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Lorette Joly, vice-présidente du conseil régional de Champagne-Ardenne déléguée aux lycées et à l'apprentissage
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Le projet de contrats tripartites (région-rectorat-établissement), prévu par le projet de loi d'orientation et de programmation pour l'école, « est ambitieux car il permettra, d'une
part, d'apporter des réponses concrètes aux dysfonctionnements que nous constatons actuellement, que ce soit en fonctionnement ou en investissement, mais aussi en ce qu'il contribuera à
la réduction des inégalités sociales et économiques, visant ainsi la réussite scolaire. L'accès au sport, à la culture, doit aussi être inclus et articulé par un contrat », indique à
AEF Lorette Joly (PS), vice-présidente déléguée aux lycées, à l'apprentissage et au patrimoine du conseil régional de Champagne-Ardenne, à la suite de l'adoption du budget primitif 2013,
le 29 janvier 2013 (1). Par ailleurs, l'évolution de la carte des formations professionnelles initiales est un autre enjeu de discussions avec le rectorat. Le conseil régional de
Champagne-Ardenne a, par un « voeu relatif à la carte des formations des lycées publics » voté en assemblée plénière, demandé au recteur d'académie « d'accorder la plus
grande attention aux spécificités du territoire champardennais », « de privilégier l'intérêt du lycéen et de sa famille à une logique purement comptable » et
de « favoriser aussi souvent que possible la mixité entre lycées professionnels et généraux ».
Cette année, la région Champagne-Ardenne prévoit de consacrer 95,75 millions d'euros à ses lycées (53,209 millions d'euros en investissement et 42,541 millions d'euros en fonctionnement),
un montant en baisse de - 7,4 % par rapport au BP 2012 (AEF n°162000).
AEF : Le budget de l'éducation est orienté à la baisse. Pour quelles raisons ?
Lorette Joly : Si le budget consacré à cette compétence apparaît en légère baisse à la première lecture, il ne faut pas en conclure à un désengagement de la région.
La construction du budget a tenu compte des contraintes budgétaires, tout en prenant en compte les crédits consommés lors du dernier exercice, qui sont le reflet des besoins réellement
identifiés.
Les crédits de fonctionnement des lycées et de l'apprentissage ont baissé de 2,310 millions d'euros, passant de 86,66 à 84,32 millions d'euros [- 2,66 %], mais restent conformes aux
crédits consommés pendant l'exercice budgétaire précédent. Ceci s'explique par une baisse des effectifs, de l'ordre de 1 040 lycéens et de 98 apprentis, au 1er janvier 2013. Cette
chute démographique s'observe depuis une dizaine d'années. Sur les quatre départements champardennais, trois enregistrent une baisse de leur population ; seul le département de
l'Aube affiche une légère hausse de + 0,5 %. Pour enrayer ce problème, la région s'est engagée depuis 2004 dans une politique volontariste, visant à mettre l'accent sur la
jeunesse.
AEF : Concrètement, comment cette priorité se décline-t-elle aujourd'hui ?
Lorette Joly : Il s'agit de mettre en place une carte des formations la plus pertinente possible, eu égard aux enjeux régionaux spécifiques. Aujourd'hui, l'objectif
est d'apporter une réponse concrète en termes d'accessibilité, d'égalité de traitement et d'élévation des niveaux de formation des jeunes.
Or, il n'est pas toujours possible de maintenir des formations partout sur l'ensemble du territoire, pour vouloir offrir systématiquement une formation à deux pas de chez soi. Dans un
contexte budgétaire imposant des choix, il est de notre responsabilité politique de prendre en compte la spécificité territoriale, l'objectif étant de maintenir une offre de formation de
qualité qui réponde aux souhaits d'orientation des jeunes et des besoins des territoires.
Ainsi, lorsque deux formations n'accueillent plus, chacune, qu'un nombre très faible d'élèves, posons-nous certaines questions. Faut-il impérativement les maintenir, sachant que les
investissements seront de fait partagés entre les deux établissements ? Ou bien, faut-il faire le choix d'une seule formation qui sera dotée des investissements nécessaires à la mise
en place d'outils de formation de qualité, contribuant à l'élévation du niveau de formation des jeunes et à une meilleure insertion professionnelle, quitte, dans ce cas-là, à ce que la
collectivité territoriale prenne en charge les frais d'hébergement et de transports du jeune qui se verrait imposer une mobilité ? En ce sens, le fonds social mis en place par la
collectivité régionale doit pouvoir répondre aux besoins identifiés des lycéen(ne)s ou des apprenti(e)s.
AEF : D'ailleurs, l'intergroupe majoritaire a fait adopter un « voeu relatif à la carte des formations des lycées publics », lors de l'assemblée plénière du 29
janvier [sans que le FN participe au vote]. Comment cette démarche progresse-t-elle ?
Lorette Joly : L'élaboration de la carte des formations professionnelles initiales se fait dans la concertation, avec la région et les autorités académiques
[rectorat et DRAF]. Dans le cadre du CPRDFP, depuis juin 2011, nous travaillons sur la construction de la carte en termes de complémentarité entre celle sous statut scolaire et celle par
apprentissage. Il faut permettre aux jeunes champardennais de choisir leur orientation et non plus de la subir, tout en prenant en compte les difficultés financières des familles.
Aujourd'hui, et c'est une triste réalité, certains jeunes de lycées professionnels sont obligés de travailler pendant leurs loisirs pour aider leur famille. En apprentissage, avec une
rémunération, l'alternance peut leur offrir la possibilité d'étudier et se former dans de meilleures conditions, plus conformes à leurs besoins. Il est donc nécessaire de trouver le bon
équilibre entre les deux voies de formation. L'une n'est pas meilleure que l'autre. Simplement, chacune correspond à un public différent.
AEF : Le secrétariat général de l'enseignement catholique de Champagne-Ardenne s'est inquiété d'une baisse des crédits d'investissement affectés aux
lycées privés (de 4 millions à 1,7 million d'euros). Comment la justifiez-vous ?
Lorette Joly : S'agissant des établissements privés, la région ne se soustrait pas à ses engagements. Certes, priorité a été donnée aux établissements
publics, et il a été décidé de figer les crédits d'investissements des lycées et CFA non propriétés de la région. Cette baisse doit s'entendre comme une situation d'attente. Dès que
seront connus les montants des recettes allouées à la région, il sera possible de reconsidérer la situation lors de la prochaine décision budgétaire modificative, comme l'a affirmé le
président Jean-Paul Bachy dans un courrier adressé au secrétaire général du comité académique de l'enseignement catholique, le 18 janvier.
AEF : Comme l'a signalé le Ceser, la région a procédé à un report d'opération immobilières : cinq opérations du PPI (plan pluriannuel immobilier) 2000-2007 ne seront
achevées qu'en 2013, et neuf opérations de l'actuel PPI seront reportées. Pourquoi ?
Lorette Joly : Pour ce qui concerne le PPI (plan pluriannuel immobilier), géré par la direction générale du patrimoine immobilier, je considère qu'il est impératif
de maintenir les opérations immobilières qui présentent un caractère prioritaire, tels que l'accessibilité aux personnes handicapées, ou la maîtrise énergétique. Par ailleurs, le
glissement de certaines opérations de restructuration et rénovation n'est pas toujours de la seule responsabilité de la collectivité, mais le résultat d'impondérables : cessations
d'activités d'entreprise, mauvaise appréhension ou non identification de problématiques qui génèrent des reports de travaux, ou des surcoûts, etc.
AEF : Avez-vous identifié des pistes d'amélioration ?
Lorette Joly : Dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour l'école, les contrats tripartites région-rectorat-établissement devraient permettre,
entre autres, de mieux appréhender ces difficultés et d'adapter le plus justement possible les constructions budgétaires. Ce travail collégial de partenariat se traduira par un contrat
pour définir, à partir de constats partagés, des objectifs et des moyens, les axes politiques en termes de formation, d'orientation, de décrochage scolaire, de numérique. Ce projet est
ambitieux en ce qu'il permettra, d'une part, d'apporter des réponses concrètes aux dysfonctionnements que nous constatons actuellement, que ce soit en fonctionnement ou en investissement,
mais aussi en ce qu'il contribuera à la réduction des inégalités sociales et économiques, visant ainsi la réussite scolaire. L'accès au sport, à la culture, doit aussi être inclus et
articulé par un contrat.
AEF : La maintenance informatique est une compétence qui pourrait être transférée aux régions, dans le cadre de la loi de programmation et d'orientation pour l'école (AEF
n°177728). Comment le
conseil régional y est-il préparé ?
Lorette Joly : Le transfert aux régions de la maintenance informatique est désormais nécessaire, indispensable. Mais il doit être impérativement accompagné par une
compensation financière et le transfert des personnels restants à ce jour sur cette mission. Aujourd'hui, cette compétence qui relève de la responsabilité de l'État n'est quasiment plus
assurée, en tout cas, plus correctement. Au fil du temps, l'État s'est de plus en plus désengagé, en réduisant les moyens nécessaires, d'abord matériels puis humains. Très souvent, ce
sont des enseignants, sur la base du bénévolat, qui assurent cette mission. Mais ils ont de plus en plus de difficultés pour accomplir cette tâche.
Or, à l'heure où le ministre Vincent Peillon a volonté de développer le numérique dans l'enseignement, il convient de donner les moyens matériels et humains pour y arriver. Au plan
territorial, ne serait-il pas judicieux d'envisager des solutions communes entre les différentes collectivités, avec la mise en place d'équipes locales qui répondraient aux besoins de
maintenance des établissements d'un même territoire ?
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